Ma vérité sur l’opération “Turquoise” au Rwanda, par Jean-Claude Lafourcade
Depuis plusieurs années, la thèse d’une participation des militaires français au génocide des Tutsi en 1994 au Rwanda est propagée et s’insinue dans les esprits. Les soldats de la force “Turquoise” sont accusés de complicité passive, mais aussi de viols, de tortures et même de participation directe aux massacres.
Ainsi donc, en 1994, les très nombreux témoins présents sur place – journalistes, membres des ONG et des organisations internationales – auraient-ils fermé les yeux ? Car pas un article, pas un commentaire, n’a relaté à l’époque cette prétendue complicité criminelle.La mission d’information parlementaire française en 1998, puis les travaux du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) ont montré la fausseté de ces allégations.
Environ 2 500 soldats français, pourtant expérimentés et endurcis, furent sur place confrontés à un drame auquel personne n’avait été préparé. Avec courage, loyauté et abnégation, ils ont oeuvré en bonne entente et efficacement avec les ONG, sauvé des dizaines de milliers de Tutsi, lutté contre le choléra, désarmé des milices, jugulé les flux de millions de civils hutu qui fuyaient devant le FPR de Paul Kagamé. Tout ne fut pas parfait, évidemment. Dans ce pays montagneux, nous n’étions pas assez nombreux pour secourir dans l’urgence tous ceux qui en avaient besoin. Et nous l’avons fait seuls. Aucune autre grande nation n’eut le courage d’intervenir.
Commandant de la force “Turquoise”, je sais que nous avons agi en conscience, dans le respect d’un mandat clair, pour l’honneur de notre pays. Ces rumeurs sont indignes et salissent les hommes que j’ai eu l’honneur de commander.
De manière constante, le régime de Kigali a accusé notre pays et son armée d’avoir été directement impliqués dans le génocide des Tutsi. Cette thèse à charge est étonnamment relayée en France par certains. Alors que les relations diplomatiques ont été récemment renouées, ce qui est positif, aucune déclaration officielle n’a clairement démenti ces graves accusations, les laissant s’inscrire dans la mémoire collective.
L’HONNEUR BAFOUÉ
Aujourd’hui, le silence des plus hautes autorités de l’Etat peut laisser penser que ces accusations sont fondées. Validées implicitement, elles resteront dans l’histoire. Si ces accusations sont infondées, elles doivent être dénoncées. Et les militaires français attendent toujours que la justice se prononce sur les très étonnantes plaintes déposées contre eux il y a plus de quatre ans, laissant le doute s’installer dans l’opinion.Face à une version travestie des faits, la parole du chef des armées est essentielle pour que soit rétablie clairement la vérité sur l’opération “Turquoise”. La raison d’Etat ne pourrait justifier que l’honneur des militaires reste bafoué et la vérité historique falsifiée.
Jean-Claude Lafourcade est général (cadre de réserve), et l’auteur d'”Opération Turquoise” (Perrin, 216 p. , 18 €).
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