Deux livres sont parus en avril dernier qui nous ont paru dignes d’intérêt. Tout d’abord, chez Max Milo, l’ouvrage de la journaliste britannique Michela Wrong, « Rwanda, assassins sans frontières », traduction française de son livre paru en 2021 « Do not Disturb ».
Cité comme le meilleur livre de l’année par le « Financial Times » et « The Economist », cette enquête, véritable pavé dans la mare, va en déranger plus d’un. Elle vient de faire l’objet d’un article dans « La Libre Belgique ».
Par ailleurs, chez L’Artilleur, un des meilleurs connaisseurs de la région, Charles Onana publie « Holocauste au Congo » avec une préface de Charles Millon.
Nous nous sommes déjà fait l’écho du combat mené par le Dr Mukwege, le célèbre gynécologue congolais qui « répare les femmes » victimes des violences commises contre elles par les milices et les troupes rwandaises en République démocratique du Congo. Malgré les menaces de mort dont il fait l’objet, il ne désarme pas et vient d’accorder au journal suisse « Le Temps » une interview sans concession qu’on lira ci-dessous. Il y réclame une nouvelle fois la publication du rapport Mapping qui révèle dès 2010 l’ampleur des exactions commises et que l’ONU sous la pression du Rwanda et de ses « parrains » a enterré
On lira également avec profit, sur le même sujet, les trois articles joints parus en octobre dans « L’Humanité » sous la plume de Marc de Miramon, dont une autre interview du Dr Mukwege
Dans un article remarquablement structuré et documenté repris par Connexion Ivoirienne, le CERMF (Centre d’étude et de réflexion sur le monde francophone) démonte en dix points les mensonges de la propagande du régime de Kigali que véhiculent les « blancs menteurs » et autres compagnons de route. On dira: » Mais nous le savons! » La question est: « Comment se fait-il que ces vérités aient tant de mal à s’imposer? »
« L’Opération Turquoise est intervenue au Rwanda à l’été 1994, alors que ce pays était ensanglanté par plus de trois années de guerre.
Or depuis plus de vingt-cinq ans, la grande majorité des études qui ont été menées sur cette opération militaire conduite par la France ont fait abstraction de ce contexte particulier.
RFI, en 2015, a eu le courage d’aborder la délicate problématique de la Région des Grands Lacs , de manière quasi-exhaustive et contradictoire puisque cette série d’émissions comporte nombre de documents journalistiques d’archives, le plus souvent d’origine belge, et des témoignages de première main donnés par des acteurs de premier plan et de différentes nationalités.
Aucune étude sérieuse sur l’Opération Turquoise ou l’action de la France au Rwanda ne peut désormais se faire sans la prise en compte de cette somme qui fait référence. »
Sur le site de la Fondation Jean Jaurès, Serge Dupuis, universitaire, chercheur spécialisé dans l’Afrique des Grands lacs, se livre à une analyse fine et équilibrée des récentes décisions présidentielles concernant nos relations avec le Rwanda (la constitution d’une commission d’historiens et l’absence présidentielle aux commémorations de Kigali).
En 1993, les offensives successives menées par l’APR avaient fini par vider le nord du Rwanda de tous ses habitants. Le processus était toujours le même : après l’arrivée des soldats de l’APR, les élites étaient séparées de la masse puis exécutées tandis que le gros de la population était convié à une réunion d’information afin, prétendait-on, de recevoir les directives des nouvelles autorités. Une fois rassemblée, cette population majoritairement hutu était prise sous le feu des armes automatiques et s’enfuyait en panique. Piétinant et abandonnant femmes, vieillards et enfants, fuyant vers le sud les rescapés s’arrêtaient dans ces terribles camps de réfugiés contenus au nord de Kigali , dont celui de Nyaçonga décrit par la vidéo ci-dessous. Regroupés par commune, hommes , femmes et surtout enfants y crevaient à petit feu de faim, de froid, de maladie et de malnutrition. En 1994, l’année suivante, les survivants qui ne parviendront pas à fuir vers l’ouest auraient été impitoyablement massacrés par l’APR.
Regardez bien cette trop rare vidéo. Elle expose très clairement la situation du Rwanda en 1993, quelques mois avant le génocide. La colère d’une population trop longtemps, trop durement et trop injustement martyrisée par l’agression venue d’Ouganda est parfaitement ressentie par le cameraman comme par le conteur. Ils pressentent l’inéluctable drame à venir, si la guerre ne prend pas fin rapidement.
Or, non seulement elle n’a pas pris fin mais elle a redoublé. Et , de surcroît, comme si les malheurs ne s’étaient pas suffisamment abattus sur ce peuple, en abattant l’avion présidentiel, on a éliminé le seul rempart auquel croyaient encore ces malheureux. Cette vidéo vous explique pourquoi le génocide de 1994, le génocide de la colère, le génocide du désespoir, était plus que prévisible, inévitablement amené par la stratégie du désastre délibérément choisie par le FPR depuis 1990, délibérément provoqué par ceux qui ont abattu l’avion présidentiel le 6 avril 1994.
Cette vidéo datant de 1993 est un terrible réquisitoire contre ceux qui ont déclenché la guerre et qui récidiveront le 6 avril 1994. Elle est d’une lumineuse – et très sombre – clarté :
Une dépêche de Jeune Afrique (à lire ci-dessous) fait état de rumeurs autour de la candidature de Mme Mushikiwabo, ministre rwandaise des Affaires étrangères et de facto numéro 2 du régime de Kigali, au poste de secrétaire général de l’OIF.
A France Turquoise nous avons d’abord cru à un bobard (« fake news » pour les non francophones), mais Jeune Afrique semble très affirmative, ce qui nous rend perplexes.
En effet, lorsqu’on visite le site de l’OIF, on découvre que les deux premières missions de l’organisation sont de:
– promouvoir la langue française et la diversité culturelle et linguistique, alors qu’après sa prise du pouvoir, le FPR a renoncé au français comme langue officielle au profit de l’anglais et a rasé le centre culturel français de Kigali au bulldozer;
– promouvoir la paix, la démocratie et les droits de l’Homme, ce qui ne semble pas être la priorité du pouvoir rwandais,c’est le moins qu’on puisse dire, les rapports successifs de Human Rights Watch (HRW)-Rwanda ou de la Fédération internationale des ligues des Droits de l’Homme en témoignent.
C’est pourquoi nous voulons encore croire qu’il s’agit d’une fausse rumeur. Ou alors ce serait à n’y rien comprendre.
A l’heure où les relations entre Paris et Kigali se tendent à nouveau après la reprise de l’instruction judiciaire française et la convocation à Paris du ministre de la défense rwandais, le général Kabarebe, en vue d’y être confronté à un témoin, transfuge du FPR, le régime rwandais, manifestement nerveux, allume des contre-feux en usant de ses bonnes vieilles techniques quelque peu éculées. Mensonges et manipulations sont relayés par le réseau habituel des « blancs menteurs ».
Il n’est pas inutile de se rappeler le billet du sociologue Marc Le Pape paru dans « Le Monde » du 20 octobre dernier à propos des attaques dont a été victime le professeur Filip Reyntjens à la parution de son « Que sais-je? » sur le génocide rwandais.
Dans un article paru sur Agoravox, Bertrand Loubard nous rappelle judicieusement que le génocide rwandais n’est pas né ex nihilo, mais qu’il a été précédé de luttes et de tensions qui ont débouché, le 1er octobre 1990, sur une agression menée depuis l’Ouganda et point de départ du drame rwandais, mais aussi de ce que l’auteur appelle « les guerres mondiales d’Afrique centrale », guerres qui sont toujours en cours.
Le premier octobre 1990 : déclenchement des « Guerres Mondiales d’Afrique Centrale »
Ce 1er octobre 2017 il y aura 27 ans que des éléments de l’armée régulière Ougandaise « entraient » sur le territoire du Rwanda. Ces éléments étaient composés, pour ce qui est des officiers, d’Ougandais d’origine tutsie rwandaise, réfugiés en Ouganda suite à la révolution rwandaise de 1959-1962. Lire la suite