Pourquoi la France ne peut pas recevoir Paul Kagame
France-Turquoise
avril 18, 2011
Il convient de rappeler qu’un rapport officiel des Nations Unies publié le 1er Octobre 2010 a
établi que l’armée du Front Patriotique Rwandais commandée par le Général Paul Kagame a
commis des crimes de guerre, des crimes contre l’humanité et des actes de génocide contre
les réfugiés hutu et les populations congolaises entre mars 1993 et juin 2003 sur le territoire
de la République démocratique du Congo.
Compte tenu du contexte politique de la région des grands lacs, certains observateurs
considèrent cette mission comme une tentative de sauvetage d’un dictateur en fin de course.
Les parents des victimes rwandaises et congolaises se demandent légitimement si cette
collaboration du Medef avec un chef d’état responsable de telles atrocités répond aux
orientations de la diplomatie française.
Le patronat français a-t-il pris toute la mesure des conséquences que ses « contrats » vont
avoir sur le sort des populations rwandaises et congolaises ? La France – hier encore accusée
par le dictateur rwandais de complicité de génocide – a-t-elle intérêt à se jeter dans les bras
d’un criminel dont le régime peut basculer à tout moment ? Autant la France a pu
commettre des erreurs d’appréciation en 1994 – reste à préciser lesquelles -, comme l’a du
reste reconnu le président Sarkozy lors de sa visite au Rwanda, autant une trop grande
proximité avec le régime rwandais actuel accusé de crimes contre l’humanité risque de
ternir irrémédiablement l’honneur de la France. Les intérêts économiques en présence
justifient-ils que la France s’implique une nouvelle fois dans ce bourbier à relents
génocidaires, en donnant l’impression de voler au secours d’un criminel africain en fin de
course, aux dépens des droits de l’homme et des peuples de la région des grands lacs ?
S’agissant d’une visite éventuelle de Paul Kagame en France, annoncée le 06/01/2011 par
l’hebdomadaire Jeune Afrique dont on connait les accointances avec le régime de Kigali, elle
apparait pour le moins inopportune pour les raisons suivantes : la France, membre du
Conseil de Sécurité, a des droits mais aussi et surtout des devoirs spécifiques liés à cette
qualité. Elle a notamment l’obligation de contribuer à garantir la paix et le respect de la
légalité internationale, en mettant tout en oeuvre afin que les préconisations et les décisions
des organes ou des institutions des Nations Unies soient traduites dans les actes. Il en va
ainsi notamment en matière de respect du droit à la vie, pierre angulaire du droit
international humanitaire.
Or comme on vient de le voir, l’une des recommandations expresses du rapport des Nations
Unies ci-haut rappelé concerne la mise en place urgente d’un tribunal international ad hoc
chargé de poursuivre et de juger les auteurs des atrocités dénoncées dans ce rapport. Déjà
pointé du doigt par les justices française et espagnole pour son rôle présumé dans l’attentat
terroriste contre l’avion du président Juvénal Habyarimana, le 6 avril 1994, attentat au cours
duquel trois ressortissants français ont perdu la vie et qui fut l’élément déclencheur du
génocide, le général Paul Kagame a aussi été le donneur d’ordre et l’organisateur de
nombreux crimes de guerre et crimes contre l’humanité au Rwanda et en République
Démocratique du Congo. Il apparaît par conséquent plus que probable qu’il soit placé sous le
coup d’un mandat d’arrêt international dès la mise en place du tribunal international ad hoc
attendu. La diplomatie française ne peut pas feindre de l’ignorer.
Dans ce cas, au nom de quelle éthique diplomatique ou pour quels intérêts nationaux la Patrie
des droits de l’homme prendrait-elle le risque, sans être accusé de complicité, de dérouler le
tapis rouge à un dictateur responsable d’avoir planifié, préparé, organisé, ordonné et supervisé
le massacre de plus de 300000 réfugiés hutu et de 5 millions de Congolais innocents ? Un
membre permanent du Conseil de sécurité des Nations Unies peut-il se permettre de recevoir
un criminel contre l’humanité désigné comme tel par les Nations Unies sans insulter les
peuples victimes de ces crimes et sans renier son rôle au sein de la communauté internationale?
établi que l’armée du Front Patriotique Rwandais commandée par le Général Paul Kagame a
commis des crimes de guerre, des crimes contre l’humanité et des actes de génocide contre
les réfugiés hutu et les populations congolaises entre mars 1993 et juin 2003 sur le territoire
de la République démocratique du Congo.
Compte tenu du contexte politique de la région des grands lacs, certains observateurs
considèrent cette mission comme une tentative de sauvetage d’un dictateur en fin de course.
Les parents des victimes rwandaises et congolaises se demandent légitimement si cette
collaboration du Medef avec un chef d’état responsable de telles atrocités répond aux
orientations de la diplomatie française.
Le patronat français a-t-il pris toute la mesure des conséquences que ses « contrats » vont
avoir sur le sort des populations rwandaises et congolaises ? La France – hier encore accusée
par le dictateur rwandais de complicité de génocide – a-t-elle intérêt à se jeter dans les bras
d’un criminel dont le régime peut basculer à tout moment ? Autant la France a pu
commettre des erreurs d’appréciation en 1994 – reste à préciser lesquelles -, comme l’a du
reste reconnu le président Sarkozy lors de sa visite au Rwanda, autant une trop grande
proximité avec le régime rwandais actuel accusé de crimes contre l’humanité risque de
ternir irrémédiablement l’honneur de la France. Les intérêts économiques en présence
justifient-ils que la France s’implique une nouvelle fois dans ce bourbier à relents
génocidaires, en donnant l’impression de voler au secours d’un criminel africain en fin de
course, aux dépens des droits de l’homme et des peuples de la région des grands lacs ?
S’agissant d’une visite éventuelle de Paul Kagame en France, annoncée le 06/01/2011 par
l’hebdomadaire Jeune Afrique dont on connait les accointances avec le régime de Kigali, elle
apparait pour le moins inopportune pour les raisons suivantes : la France, membre du
Conseil de Sécurité, a des droits mais aussi et surtout des devoirs spécifiques liés à cette
qualité. Elle a notamment l’obligation de contribuer à garantir la paix et le respect de la
légalité internationale, en mettant tout en oeuvre afin que les préconisations et les décisions
des organes ou des institutions des Nations Unies soient traduites dans les actes. Il en va
ainsi notamment en matière de respect du droit à la vie, pierre angulaire du droit
international humanitaire.
Or comme on vient de le voir, l’une des recommandations expresses du rapport des Nations
Unies ci-haut rappelé concerne la mise en place urgente d’un tribunal international ad hoc
chargé de poursuivre et de juger les auteurs des atrocités dénoncées dans ce rapport. Déjà
pointé du doigt par les justices française et espagnole pour son rôle présumé dans l’attentat
terroriste contre l’avion du président Juvénal Habyarimana, le 6 avril 1994, attentat au cours
duquel trois ressortissants français ont perdu la vie et qui fut l’élément déclencheur du
génocide, le général Paul Kagame a aussi été le donneur d’ordre et l’organisateur de
nombreux crimes de guerre et crimes contre l’humanité au Rwanda et en République
Démocratique du Congo. Il apparaît par conséquent plus que probable qu’il soit placé sous le
coup d’un mandat d’arrêt international dès la mise en place du tribunal international ad hoc
attendu. La diplomatie française ne peut pas feindre de l’ignorer.
Dans ce cas, au nom de quelle éthique diplomatique ou pour quels intérêts nationaux la Patrie
des droits de l’homme prendrait-elle le risque, sans être accusé de complicité, de dérouler le
tapis rouge à un dictateur responsable d’avoir planifié, préparé, organisé, ordonné et supervisé
le massacre de plus de 300000 réfugiés hutu et de 5 millions de Congolais innocents ? Un
membre permanent du Conseil de sécurité des Nations Unies peut-il se permettre de recevoir
un criminel contre l’humanité désigné comme tel par les Nations Unies sans insulter les
peuples victimes de ces crimes et sans renier son rôle au sein de la communauté internationale?
La seule décision de sagesse à prendre par la diplomatie française est celle qui correspond
aux valeurs de la République et à ses engagements internationaux. La France doit écouter les
peuples de la région des grands lacs et non les tyrans par qui le génocide est arrivé. En
s’inspirant de l’expérience tunisienne et égyptienne, le principe de précaution diplomatique et
politique devrait s’appliquer au cas rwandais sans état d’âme. La France ne peut pas recevoir
un chef d’état étranger accusé de génocide. Tomber dans le piège d’une normalisation à tout
prix mais dont les enjeux paraissent pour le moins éphémères serait une erreur
d’appréciation de plus, une faute grave dont la diplomatie française ne se relèverait pas.
Jean-Marie NDAGIJIMANA
Ancien Ambassadeur
Ancien Ministre
Ancien Ambassadeur
Ancien Ministre